Des prix en primeur trop élevés? Le Négoce, un système « has been »? Non, les grands Bordeaux doivent seulement se donner les moyens de leurs ambitions

Guillaume Jourdan Vitabella Wine

(Cet extrait de rapport a été écrit par Guillaume Jourdan. Suivez nous sur Facebook)

Aprés le Stop Bordeaux Bashing que nous avions lancé en 2014, voici revenues les critiques que nous entendons déjà depuis plusieurs années, à l’occasion de cette nouvelle campagne Primeurs 2014: 1) Les prix des grands Bordeaux sont trop élevés 2) Le système du négoce à Bordeaux est « has been ». Je crois que le vrai problème de Bordeaux n’est pas là. Bordeaux connait une période de transition majeure. Dans un article récent paru dans le WINE SPECTATOR intitulé « Le Piège des Primeurs à Bordeaux », Jean-Louis Carbonnier – qui s’occupe du Marketing US de Château Palmer – a expliqué : «Le problème des primeurs est que la concurrence des grands noms de Bordeaux n’est basée que sur le prix (… ) Tous les vins sont proposés en même temps et les seuls éléments dont le consommateur bénéficie pour les juger sont le prix et le score. » Cette période de transition que les grands châteaux de Bordeaux traversent est une période compliquée durant laquelle ils doivent repenser leur stratégie Marketing afin de trouver une solution à ce problème. Dans son excellent article dans Decanter Asia, Jane Anson explique: « Les chateaux doivent être plus actifs sur les marchés soit en faisant de la publicité ou du marketing ». Pourquoi? Parce que le vrai problème n’est pas le prix élevé des grands châteaux. Ni un système du négoce dépassé. Non, les grands Bordeaux doivent seulement aujourd’hui se donner les moyens de leurs ambitions en adoptant une stratégie de marque de luxe. Ce sans quoi, à terme, la stratégie des grands Bordeaux sera vouée à l’échec.

Une stratégie de marque de luxe ? Mais qu’entend-t-on par Luxe ?Le luxe est l’ordinaire des gens extraordinaires et l’extra-ordinaire de tous les autres. En réalité, les marques de luxe ne peuvent exister sans l’une ou l’autre de ces deux cibles. Mais, j’ajouterais aussi immédiatement que le Luxe représente avant tout le futur de la tradition. Et les prestigieux châteaux de Bordeaux ont toutes les cartes en main pour réussir alors que de plus en plus de consommateurs aisés recherchent une grande tradition ancrée dans la modernité, une culture attachée à un pays et une part d’exclusivité.

Chaque année, quand j’échange avec les châteaux à propos de leur politique de prix en primeur, je privilégie toujours l’approche long terme à celle court terme. Fixer des prix élevés en primeur ne fait pas d’un château, une marque de luxe. Pour être une marque de luxe, les châteaux doivent susciter l’envie en atteignant un haut niveau de luxe perçu et en faisant également rêver. Une petite production ne fait pas non plus d’un château, une marque de luxe. En réalité, aujourd’hui, la niche n’a plus le vent en poupe sur le marché du luxe. Parce qu’une marque de luxe peu connue ne peut pas acquérir le capital symbolique que recherchent les consommateurs: le statut et le respect. Et le besoin de statut implique nécessairement que les marques soient visibles et et connues. A titre d’exemple, on peut se référer à l’article d’Adam Lechmere publié aujourd’hui sur Wine Searcher, où l’on peut lire que les 2014 de Mouton Rothschild and Lynch-Bages se sont vendus « comme des petits pains ». Deux raisons principales de la réussite de ces placements? La production de ces deux châteaux est importante et ils ont fait de gros efforts pour promouvoir leurs marques à l’international depuis des décennies.

Les grands châteaux connaissent une phase de transition. Dans le monde du Vin, les marques de luxe doivent conquérir de nouveaux consommateurs. Un prix élevé, seulement, ne suffit pas. Il doit aussi y avoir de la séduction autour de la marque. Une petite production, seulement, ne suffit pas. La désirabilité d’une marque est corrélée à la différence entre la notoriété de la marque et son taux de pénétration. Une note élevée d’un critique majeur, seulement, ne suffit non plus. Les nouveaux consommateurs choisissent les marques par mimétisme, non pas par adhésion aux valeurs ni par connaissance. Les grands Bordeaux sont aujourd’hui face à cette réalité et doivent se donner les moyens de leurs ambitions pour réussir à terme.

Pour en savoir plus sur les prix élevés des vins, vous pouvez lire l’article de Richard Hemming publié ce jour: Do You Need a Time Machine to Find Value in Wine?

(*Since 2003, VitaBella Luxury Wine has been advising more than 200 prestigious wine estates for their international communication strategy incl. Chapoutier, Hugel, Dr Loosen, Famille Perrin, Brad Pitt & Angelina Jolie’s Miraval…More about VitaBella – Write to info@vitabella.fr)